Une origine très ancienne
L’origine de ces plis particuliers est à retrouver dans la mode du 14 ème siècle, époque où le vêtement occidental connaît d’importants changements. Une différentiation de plus en plus marquée s’installe entre les vêtements masculins et féminins. Celui des hommes se raccourcit, s’élargit au niveau des épaules. Le costume s’accompagne de plis nombreux qui structurent la silhouette.
Celui des femmes prend, à l’opposé, de l’ampleur au niveau des jupes, la finesse de la taille étant de plus en plus accentuée.
La houppelande et ses plis ″gironnés″
Ce vêtement, apparu à la fin du 14ème siècle et semblable à un large manteau, a été porté aussi bien par les hommes que les femmes. De longueur variable, il est souvent prolongé par une longue traîne dans sa version féminine.
La houppelande se caractérise par un important volume textile qui nécessite l’emploi de larges ceintures pour en maîtriser l’ampleur.
Autour de cette ceinture qui resserre le vêtement au niveau de la taille, s’organise un ensemble de plis réguliers. Ces plis sont dits ″gironnés″ de par leur allure en rayons réguliers, répartis autour de la ceinture.
Un symbole de noblesse
La houppelande est le vêtement des personnes nobles et fortunées. A une époque où la matière textile est chère, le volume de tissu qui intervient dans sa confection traduit de fait le luxe. Cette ampleur, jointe aux nombreux plis soigneusement répartis, oblige son porteur à la contenance, des mouvements trop amples risquant de nuire à l’harmonie du vêtement.
Cette économie du geste ajoute au caractère aristocratique du vêtement. Comportement qui introduit peu à peu la notion de contrainte physique comme partenaire obligée de l’élégance.
*Le terme de ″canon ″ est issu du grec kanôn ″tige de roseau″. Il se rapporte à la forme même de ces plis, rangés en cannelures rectilignes.
Il s’applique également à d’autres objets de forme cylindrique tels le canon d’artillerie ou l’unité de mesure destinée à mesurer les liquides, un canon de rouge.
Des plis façonnés
Au fil du temps, la difficulté de maintenir l’ordonnancement des plis fait évoluer la conception du vêtement. Ces plis sont à présent cousus, structurés et canalisés en lignes régulières nettes. Le principe des plis canon apparaît. Leur forme arrondie est soulignée par des effets de rembourrage qui, par leur nombre et leur épaisseur, renforcent l’impression d’opulence.
Une silhouette transformée
Ces vêtements abondamment plissés, aux lignes structurées, modifient les apparences, remodèlent les silhouettes. Les manches s’élargissent, se gonflent. A la Renaissance, le costume masculin prend du volume, s’élargit autour des épaules tandis que les jupes féminines se garnissent de plis toujours plus nombreux. Ces effets de surépaisseur, loin d’être ressenties comme disgracieuses ou contraignantes, sont un signe d’opulence qui ajoute du prestige à la tenue.
Grace aux plis canons, qui organisent le volume du costume, la minceur de la taille est mise en valeur par rapport aux hanches, critère obligée de la beauté féminine.
Pour accentuer cet aspect bien particulier, on n’hésite pas à superposer plusieurs niveaux de jupes, créant ainsi la silhouette ″en sablier″ qui deviendra la norme au cours des siècles suivants.
En parallèle, elle renforce l’impression de fécondité que les hanches élargies donne aux femmes.
Une permanence dans le temps
Abandonnés à partir du 17è siècle par les costumes bourgeois et aristocratiques, les vêtements lourdement plissés vont rester en vogue dans les campagnes.
Un peu partout en Europe, ils vont continuer d’y incarner la prospérité, le rang social important et font partie des techniques de confection traditionnelle les plus courantes, en particulier pour les jupes.
Plusieurs explications à cette continuité. Dans le milieu rural, naturellement porté au conservatisme, ils restent synonymes de aisance financière, de statut social.
Par ailleurs, ils aident à structurer le tissu de laine qui reste majoritaire dans la confection des costumes ruraux , la technique des plis canon étant la solution la plus efficace pour garder en forme de grands métrages et ce, malgré la complexité de sa mise en œuvre.
Cet héritage lointain de l’époque médiévale va ainsi traverser les lieux et les époques, apportant aux costumes traditionnels toute leur spécificité.
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Voir article sur la couture des plis canon ici.
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Références
- Le costume Français – Flammarion 1996
- Parades et Parures – L’invention du corps de mode à la fin du Moyen-Âge – Odile Jacob – Éditions Gallimard 1997
- Histoire des modes et du vêtement – Du Moyen Âge au XXIe siècle – Éditions Textuel
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